Le gouvernement d’Andrej Babiš dans l’attente du « verdict » de la social-démocratie

Andrej Babiš, photo: ČTK

Les négociations pour la formation d’une coalition gouvernementale ont progressé ces derniers jours. Un terrain d’entente a été trouvé entre les leaders du mouvement ANO et du parti social-démocrate (ČSSD), Andrej Babiš et Jan Hamáček, sur le contenu de l’accord de coalition comme sur le programme de celle-ci. Ces avancées près de sept mois après la tenue des élections législatives ne signifient pas pour autant encore que cette coalition verra bien le jour. Il appartient en effet désormais au club parlementaire du ČSSD de décider de la suite à donner aux accords trouvés. Or, beaucoup de députés sociaux-démocrates restent opposés à l’idée d’une nouvelle coopération avec le mouvement ANO, et plus particulièrement avec l’actuel Premier ministre démissionnaire Andrej Babiš, dont les poursuites judiciaires dont il est l’objet depuis plusieurs mois continuent de constituer un obstacle à la formation d’un nouveau gouvernement dont il serait le chef.

Andrej Babiš,  photo: ČTK
En juin prochain, la République tchèque aura peut-être enfin un nouveau gouvernement. Il s’agirait alors d’une coalition constituée de ministres du mouvement ANO et sociaux-démocrates, qui serait tolérée par le parti communiste de façon à obtenir la confiance de la Chambre des députés. Mais il se peut tout aussi bien que les électeurs tchèques restent dans l’expectative. Le sort des négociations qui ont été menées jusqu’à présent entre les directions des deux formations dépendra du résultat du référendum interne auquel seront conviés, probablement le 8 juin, les membres du ČSSD. Il leur sera alors demandé s’ils acceptent ou n’acceptent pas les conditions de l’accord de coalition et le contenu du programme de l’éventuel gouvernement convenus avec le mouvement ANO. Avant cela, dès ce vendredi, les députés sociaux-démocrates seront appelés à se prononcer sur la suite à donner au rapprochement avec la formation d’Andrej Babiš ; une première échéance charnière que ce dernier semble attendre sereinement, comme il l’a confié mardi à l’issue de sa réunion avec le président de la République :

« L’important, ce sera la position qu’adoptera le club des députés sociaux-démocrates lors de son vote. De notre côté, nous nous efforçons de leur expliquer notre position, même si ce n’est pas évident, car elle ne fait pas l’unanimité. En même temps, je pense que tout le monde souhaite que nous puissions enfin avoir un gouvernement qui dispose de la confiance de la Chambre des députés de façon à pouvoir travailler plus sereinement. »

Jan Hamáček,  photo: ČTK
Andrej Babiš et Jan Hamáček n’ont guère été plus loquaces sur le contenu de leurs discussions. Le leader social-démocrate s’est contenté d’indiquer que le texte qui a été formulé « est acceptable pour le ČSSD et résout toutes les choses qu’il était nécessaire de résoudre ». Sur ce point, les deux conditions posées par la social-démocratie à la direction du mouvement ANO étaient les suivantes : la démission d’Andrej Babiš des fonctions de Premier ministre s’il est reconnu coupable dans l’affaire dite du « Nid de cigognes » (cf. : http://www.radio.cz/fr/rubrique/infos/affaire-du-nid-de-cigognes-le-vice-president-du-mouvement-ano-nest-plus-poursuivi) et la révocation de certaines hautes fonctions à la Chambre basse de députés membres du parti d’extrême droite SPD, et notamment de son leader Tomio Okamura, actuel vice-président de la Chambre.

Plus généralement, tout ministre serait tenu de démissionner s’il est reconnu coupable en première instance dans quelque affaire que ce soit. Par ailleurs, Andrej Babiš serait lui aussi contraint d’agir de la sorte si les cinq ministres sociaux-démocrates qui siégeraient au sein de la coalition démissionnaient en bloc. Sans confirmer ni infirmer cette version, Andrej Babiš, qui remplit actuellement les fonctions de Premier ministre démissionnaire depuis janvier dernier, a déclaré qu’il ne voyait « aucune raison que quelqu’un soit condamné ».

Vojtěch Filip,  photo: ČTK
De leur côté, les communistes ont confirmé par la voix de leur président Vojtěch Filip qu’ils étaient prêts à tolérer ce gouvernement bipartite ANO-ČSSD. Si tel était le cas, cette attitude marquerait alors de facto leur grand retour au pouvoir, vingt-huit ans après la révolution de velours. Et il est alors fort possible, comme le remarquait ce mercredi le quotidien slovaque Denník N, que le parti social-démocrate, déjà bien mal en point depuis les élections de l’automne dernier et en chute libre dans les sondages, finisse « de creuser sa tombe » au profit un peu plus encore d’Andrej Babiš.